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Sommaire
La connaissance La gestion des connaissances- La problématique
- Partager les connaissances
- Valoriser les connaissances
- Connaissance et processus
- Définitions
- La gestion des connaissances dans l’entreprise
A Lire
La Connaissance
Qu'est-ce que la connaissance ? Le savoir-faire est un sous-ensemble des connaissances d'une personne qui lui permet d'effectuer une action avec efficience. Les mots connaissances, compétences, information sont souvent utilisés pour des discours marketing afin de faire passer des prestations d'informations pour des prestations de connaissance. Il convient donc d'éclaircir ces concepts, car "avoir une information, ne veut pas dire la comprendre".
Définitions
Il est intéressant de revoir les définitions telles qu'elles figurent dans nos dictionnaires. Parfois, plusieurs sens sont donnés à un mot. Seuls les sens propres à la gestion des connaissances sont retenus.
Connaissance : n.f. (de connaître). I.1 Faculté de connaître, de se représenter; manière de comprendre, de percevoir. [...] Ce que l'on a acquis par l'étude ou la pratique... (Le Petit Larousse)
Savoir-faire : N. m. inv. Habileté à mettre en œuvre son expérience et ses connaissances ; Synonymes : compétence, adresse. (Dictionnaire Hachette multimédia).
Compétence : n.f. (Lat. competentia, juste rapport). Capacité reconnue en telle ou telle matière, et qui donne le droit d'en juger. (Le Petit Larousse)
Savoir : n. m. Ensemble des connaissances acquises par l'étude. (Le Petit Larousse)
Connaissance, information et donnée
Après les définitions des mots, il est indispensable de différencier les concepts de connaissance et information, sans oublier, la donnée. La connaissance (qui traite l'information) est plus vaste que l'information (qui transite). La connaissance formalisée est de l'information.
Information
L'information est une donnée avec une valeur particulière et une ou plusieurs significations, et parfois différentes selon les personnes et/ou le contexte (il pleut, il fait mauvais...).
« L'information est un signifié transporté par une donnée. Ce signifié est dépendant des procédures de décodage des données (c'est-à-dire d'extraction de l'information) et de l'univers cognitif des agents qui mettent en œuvre ces procédures" (« Vers une informatique cognitive dans les organisations », 1996, Prince).
Donnée
La donnée est une valeur dans un champ. Elle peut être sous une forme cognitive, informatique ou dans des documents sous forme de texte .... (temps = " Pluie " ou Pluie = " Oui " ...). Une donnée peut exprimer une mesure, un coût, une désignation, un état, etc..
« Nous appellerons donnée tout signifiant susceptible d'être capté, enregistré, transmit ou modifié par un agent cognitif de traitement de l'information, naturel ou artificiel (l'ensemble de ces fonctions n'est pas obligatoire pour tout agent) » (« Vers une informatique cognitive dans les organisations », 1996, Prince).
Connaissance
La connaissance permet de traiter, comprendre des données ou des informations. Elle donne un sens à la donnée, qui devient alors une information, raisonne et agit ou fait agir en fonction. (Tiens ! Il pleut, donc il fait mauvais, je vais prendre mon parapluie).
« La connaissance est le mode d'emploi permettant de transformer les données en informations. C'est donc ce qui est associé au passage entre le signifiant et le signifié » (« Vers une informatique cognitive dans les organisations », 1996, Prince).
Savoir-faire
Le savoir-faire est un sous-ensemble des connaissances d'une personne, utilisé pour réaliser une action. Il est souvent une compilation de savoir, optimisé pour gagner en performance (qualité, temps, quantité).
Savoir-être
« La faculté à se comporter qui permet de mettre en œuvre le savoir-faire et le savoir théorique » (Def. De J-M. Bruneau et J-F. Pujos dans « Le Management des Connaissances dans l’entreprise » Les Éditions d’organisation, Paris 1992)
De l’information au savoir-faire
La connaissance formalisée devient de l’information. L’ensemble de données, messages, savoirs, images, transitent par des médias pour aller d’individus à individus. Une information qu’elle soit un savoir (une recette de cuisine, une meilleure pratique) ou un état (le temps aujourd’hui, le nombre de clients,…), doit être utilisée par la personne et donc par son cerveau pour devenir une information utile. Le savoir-faire se construit au fil du temps par le travail incessant du cerveau qui conceptualise, regroupe, optimise, simplifie… Ainsi, dans le contexte d’un métier, une information « utile » va être traitée et intégrée dans le savoir à travers le raisonnement et les concepts comme le montre le schéma suivant.
De l'information au Savoir-faire
Les définitions « simplistes » de cette figure ont permis d’expliquer simplement les concepts de la connaissance et de l’information. Ainsi, ce qui est véhiculé par la parole, les données, l’écrit, est de l’information, ce qui permet d’écouter, lire, analyser, comprendre, exploiter est la connaissance, et elle n’est que dans le cerveau. On peut cependant se poser la question de la « connaissance » matérialisée par des programmes et des données et qui traitent de l’information plus ou moins codifiée dans les ordinateurs. Cette connaissance plus rigide n’évolue pas encore toute seule, il faut souvent la reprogrammer. On peut accepter le terme de « système de connaissance » à des solutions informatiques qui se rapprochent du fonctionnement humain. Tout le reste n’est que traitement de l’information, L’Information est de la connaissance mise en forme :
« L’étymologie d’information, objet à la base de communication de toute connaissance, est « in-forma » : donner une forme. La matière première à mettre en forme est le savoir ou la connaissance. La forme la plus commune dans laquelle la connaissance prend vie est le langage » (« Vers une informatique cognitive dans les organisations », 1996, Prince).
L’information prend des formes multiples par son contenu. Quand une connaissance est formalisée elle devient information ; Cette information n’a pas la même « teneur » si elle provient du journal télévisé ou d’un client. Le cerveau compile toutes les informations, sous toutes ses formes, et les associe entre-elles. Il n’est donc pas rare lorsqu’on modélise la connaissance d’avoir à la fois de la connaissance pratique (« comment je fais ») et de l’information (sur un client, les cas particuliers, etc.). Le modélisateur se retrouve confronter au problème de la généralisation, faire du cas particulier une règle générale, ou laisser la connaissance dans sa description initiale avec ses cas particuliers. Information et connaissance sont donc étroitement liées. Dans le flux d’informations qui arrive aux postes de travail, on peut catégoriser l’information en trois groupes :
- L’information qui impacte la connaissance, un savoir-faire, une méthode, une présentation, un livre de connaissance…
- L’information de production utilisée pour la réalisation de l’activité, un document, un plan type, une donnée, une lettre de mission, des règles métiers…
- L’information « informative », benchmark, concurrence, nouvelles…
Pour gérer la connaissance, il est donc utile de bien dissocier les deux concepts « information » (donnée, connaissance, mise en forme) et « connaissance » (qui traite l’information, réagit et évolue). Ceci est le premier principe de la gestion des connaissances, elle doit répondre à ces deux questions : que faut-il savoir ? Qui doit savoir quoi ? La formalisation des connaissances s’inscrit dans cette problématique : « quelle connaissance est à sauvegarder ? », « a qui dois-je transmettre la connaissance d’un expert et sous quelle forme ? ». La connaissance est à la fois une « chose » à sauvegarder et à enrichir.
Dans l’entreprise, le problème est plus global, connaissance et information sont mélangées. Par exemple, les projets d’intranet visent à mettre à disposition toute l’information utile au poste de travail, y compris le savoir-faire.
Le savoir-faire, lui est souvent méconnu et certaines entreprises pensent sauvegarder les savoir-faire quand elle formalise les méthodes, les plans, les données. Ce n’est pas en sauvegardant le plan d’une maison que l’on sauvegarde le savoir-faire d’un architecte, seul le résultat de son savoir-faire est sauvegardé ; son savoir-faire est sa capacité à concevoir une maison et à en faire un plan.
La gestion des connaissances présentée ici est basée sur la formalisation des savoir-faire, la description du « comment l’expert fait ». Cette approche peut paraître réductrice par rapport aux écrits sur le management des connaissances (veille économique, gestion documentaire…). Dans l’entreprise la frontière entre connaissance et information n’est pas autant marquée et la Gestion des Connaissances traite souvent les deux sujets avec l’objectif d’organiser le flux d’informations (donnée, savoir, information) aux postes de travail.
La gestion des connaissances
La gestion des connaissances est souvent présentée et justifiée par la valeur du capital intellectuel, le contexte de la mondialisation, la complexité croissante du monde et la nécessité d’avoir des organisations « intelligentes ». Je préfère aborder la gestion des connaissances à la source, à la connaissance, objet immatériel qui pose des problèmes aux organisations. A l’origine, la gestion des connaissances visait à sauvegarder et développer les savoir-faire ou toute forme de connaissance. Elle repose sur des principes et assure certaines fonctions dans l'organisation.
La problématique
Le savoir-faire de l’organisation
On parle du savoir-faire d’une entreprise aussi bien que du savoir-faire d’une personne comme une qualité valorisante et différenciatrice des autres (concurrents ou employés). Le savoir-faire est la capacité à faire de l’entreprise et elle n’est pas égale à la somme des savoir-faire des personnes qui la composent. Le savoir-faire est complexe est repose aussi sur les liens entre les acteurs de l’organisation. Les démarches de management par la qualité tente par leurs évaluations, de faire prendre conscience de la complexité de l’entreprise par l’identification des liens d’influence qui affectent ou développe les performances. L’approche globale de l’entreprise est une réponse à la complexité croissante du monde de l’entreprise. L’illustration suivante tirée d’un document de la fondation EFQM (www.efqm.org) présente le modèle d’excellence. Il s’intéresse aux résultats mais aussi aux moyens d’obtenir ses résultats. Le savoir-faire se trouve disséminé dans le leadership (savoir-faire du management), « People » (les personnes), les processus et les ressources (valorisation du capital intellectuel) et la boucle d’apprentissage et d’innovation.
Le modèle EFQM
Une personne, un savoir-faire
Le savoir-faire qui nous intéresse est celui des acteurs de l’organisation. Il est indissociable de l’individu qui le possède. Les organisations tentent depuis quelques années de faire considérer les compétences comme une ressource externe aux individus (l’interchangeabilité de la compétence), en rationnalisant celles-ci par des caractéristiques mesurables et maîtrisables. Mais certains individus développent une compétence particulière, une efficacité et une connaissance optimisée, qui en font des personnes difficilement interchangeables.
L’individu est un maillon du processus
Cela semble trivial de faire cette observation : l’individu est un des rouages du processus. S’il est malade, le processus est affectée, s’il travaille mal, le processus est moins efficace, si la personne améliore ses performances, le processus est plus performant.
Optimiser le processus
Savoir-faire volatile
L’importance du savoir-faire se mesure souvent lors d’un départ de son détenteur pour des vacances ou, plus définitivement, après une démission ou un départ à la retraite. L’activité peut être plus ou moins affectée par cette « fuite » de savoir-faire. Ce dernier prend du temps à se « re-fabriquer » : il est le fruit d'expériences, de cas rencontrés, de démarches empiriques, d’optimisation de gestes et de manière de faire… L’histoire des entreprises est riche en exemples.
Savoir-faire hétérogène
Dans d’autres cas, par exemple dans des activités de vente assurée par plusieurs employés, les performances individuelles sont différentes d’une personne à l’autre. Ces différences peuvent s’expliquer par le contexte (une région difficile,…) mais aussi par une différence de savoir-faire (on parle aussi de compétence). Si le partage des savoir-faire des meilleurs vendeurs ne transforme pas tous les autres en très bons vendeurs, il fait progresser les performances collectives. Dans la course à l'optimisation, le savoir-faire est un des derniers leviers de progrès traité : on a mécanisé, organisé, automatisé, robotisé, géré la ressource humaine, les compétences, et maintenant le savoir-faire et plus largement, la connaissance.
Optimiser le processus avec le savoir-faire
Le développement naturel du savoir-faire
L’entreprise a donc besoin de connaissances pour fonctionner. Chaque processus doit en partie sa performance à la qualité de ses acteurs. La caractéristique de l’homme est de développer un savoir-faire, c’est à dire d’optimiser la pratique de son métier. Il améliore ses raisonnements, compile et trie les informations, optimise ses gestes.
Travailler les savoir-faire
Une équipe de football s’entraîne techniquement et physiquement. Le savoir-faire se développe au cours des matchs autant individuellement que collectivement (connaissance des équipes, des tactiques, résistance au stress, entente des joueurs entre eux…). L’entraînement permet d’analyser les points faibles et de les travailler. L’entreprise se consacre rarement à ses métiers, à sa technique. Le management se fait souvent par les résultats. L’exemple de l’équipe de sport est à reprendre pour l’entreprise avec un changement d’état d’esprit vers une dynamique de progrès individuelle et collective.
Améliorer les savoir-faire augmente les performances
L’idée est donc d’une part de sauvegarder et exploiter au mieux les savoir-faire de l’entreprise, donc d’identifier les personnes à fort savoir-faire, capitaliser et partager leur connaissance, et d’autre part, d’essayer de faciliter le développement « naturel » du savoir-faire. L’impact se mesure dans les performances et dans les évaluations qualité de l’activité.
La gestion stratégique du savoir
Le savoir-faire est un sous-ensemble particulier de la connaissance. Il est critique pour certaines activités par sa caractéristique « volatile », mais il reste un sous-ensemble. Il n’y a qu’un pas aux passionnés du « knowledge management » pour s’intéresser au reste de l’ensemble, la connaissance. Le mot connaissance est alors utilisé dans tous ses sens possibles, allant jusqu’à faire passer de l’information pour de la connaissance et un logiciel de messagerie pour un outil de gestion des connaissances. Nous avons vu dans le chapitre « La connaissance » que celle-ci est une « chose » bien précise. Nous restons ici centrés sur les individus et leurs connaissances. Pour l’entreprise, la question se pose de savoir quelles connaissances doivent être apportées à ses employés ? Que nous faudra-t-il savoir demain ? Comment acquérir ces connaissances ? Ces questions se posent à court terme (maintenant) et à moyen terme (demain). L’entreprise prend conscience qu’elle doit savoir et, alors qu’autrefois on apprenait un métier pour la vie, aujourd’hui, les technologies, les pratiques, les outils, les modes… changent de plus en plus vite. Si l’entreprise doit s’adapter et apprendre (réaction), elle doit aussi prévenir et se préparer aux changements de demain (pro-action) et chercher à se différencier (innovation). Au quotidien, l’entreprise organise le flux de connaissance vers ses employés (formation continue, information, échanges…). Stratégiquement, elle se projette plus ou moins loin dans le futur, s’imagine, se définit et prépare les changements pour atteindre ses objectifs. Pour les atteindre, elle revoit parfois son organisation, et lorsqu’elle y pense (malheureusement encore rarement), les connaissances qu’elle devra développer ou acquérir. Malheureusement encore rarement ! Combien de rachats d’entreprise, de réorganisations ont fait fi des connaissances et des savoir-faire ? Les financiers et les organisateurs, déshumanisés par la lourde tâche de « dégraisser » l’organisation, oublient trop souvent l’aspect connaissance au profit des leviers possibles pour licencier (préretraite, mutation…). Ils créent un chaos, un coup de pied dans la fourmilière, et attendent le rééquilibrage en pesant de tout leur poids managérial. D’autre part, en 1995, lorsque le « KM » commençait à devenir un nouveau sujet à la mode, beaucoup de managers pensaient qu’il n’était pas possible de formaliser « tout ce qu’il y a dans la tête d’une personne ». Le cerveau a encore ses mystères et la gestion des connaissances ne prétend pas les résoudre tous. Enfin, à la décharge des managers, le « KM » n’existait pas « avant » et les entreprises ont toujours fonctionnaient. En fait, les entreprises faisaient de la gestion des connaissances sans le savoir, par le compagnonnage, par des échanges informels, par le recrutement et par la formation. La gestion des connaissances apporte de nouvelles techniques (formalisation des connaissances, intelligence artificielles, communication…) et donc des nouvelles possibilités. Elle s’intéresse aux processus de l’organisation, identifie les savoir-faire « critiques » et permet une gestion stratégique du savoir.
Partager les connaissances
La gestion du savoir-faire ou des connaissances a un objectif : sauvegarder le savoir-faire et le partager soit au futur remplaçant, soit aux personnes du même métiers.
Le principe du tacite au tacite
En reprenant le schéma d’une présentation de Jean-Louis ERMINE, lui-même inspiré des différentes réflexions sur le partage des connaissances (NONAKA…), modifié ensuite par moi-même, nous voyons que le principal problème de la gestion des connaissances et « comment faire pour transmettre une connaissance ? ».
Cycle du partage des connaissances
La connaissance « tacite » est non formalisée, contenue dans les cerveaux des personnes.
Le transfert de tacite à tacite se fait par des échanges (compagnonnage, communauté, conférences, machine à café…) essentiellement par la parole. Ce transfert direct a l’avantage d’être immédiat et interactif. L’inconvénient est qu’il reste dans la culture orale, non formalisé, dépendant de la qualité de communication et de compréhension des interlocuteurs.
L’idée suivante est de formaliser la connaissance (explicitation). C’est le manuel, la recette de cuisine, un document, un site web, le livre de connaissance etc.. Les formalisations des connaissances sont plus ou moins exhaustives sur le sujet mais suffisent souvent à reproduire la connaissance décrite ; Par exemple, une recette de cuisine n’explique pas les phénomènes de changements physiques et chimiques qui s’opèrent aux mélanges et à la cuisson des aliments, et pourtant, elle suffit souvent à reproduire le plat (enfin, en théorie).
Le partage est l’échange de connaissances explicitées. Il se fait par les livres, documents, internet, messagerie, système informatique d’aide à la décision (SIAD), etc.. Le partage ne résout pas tout le problème de la transmission du savoir, dans tous les cas, en transfert direct (tacite à tacite) ou indirect (tacite à explicite et explicite à tacite), le problème est l’appropriation.
L’appropriation est la réutilisation de la connaissance par la personne. Pour certaine activité, cela peut demander des mois d’efforts et de perfectionnements. Pour aider l’appropriation, on peut utiliser des techniques pédagogiques (formation, compagnonnage…) et un système de suivi (coaching) et d’évaluation de la performance (et donc de la compétence). Expliciter et partager sont les deux axes de recherche de la gestion des connaissances. Si cette problématique existe depuis que l’homme a un savoir à transmettre à ses générations suivantes, les savoirs deviennent complexes, changent souvent, et le temps et les moyens pour les transférer manquent de plus en plus. J’ajoute au modèle original la conception.
Une fois la connaissance formalisée, il arrive souvent à cette formalisation d’être modifiée ou optimisée. Voir la connaissance modélisée donne une vision d’ensemble et permet de prendre du recul, donc éventuellement de la reconcevoir. Cette formalisation permet aussi de suivre les performances de l’activité par rapport à la connaissance (quelle partie de la connaissance produit le résultat ?) ; La connaissance est formalisée, modifiée puis communiquée pour appropriation.
Le cycle de la gestion des connaissances
Les nouvelles technologies et les sciences cognitives apportent de nouvelles solutions pour, premièrement, avoir une vue sur la connaissance, comment elle est mémorisée dans le cerveau, sur la pédagogie, comment apprendre un savoir, puis deuxièmement, dans la reproduction artificielle et la communication. Ainsi, en utilisant le principe de la formalisation des connaissances, on créait une « base de connaissance » qui peut être utilisée de différentes manières.
Cycle de la gestion des connaissances
Identifier
Avant tout, quels sont les savoir-faire à formaliser ? Tout savoir-faire n'est pas bon à capitaliser et tout n’est pas capitalisable de suite : coût, intérêt, criticité... doivent être évalués. La Gestion des Connaissance prend en compte les intérêts stratégiques de l'entreprise (qualité, développement,...) et la nécessité de "garantir" la fiabilité du processus.
Identifier les savoir-faire implique d'avoir une vue de l'activité, des processus, de qui fait quoi et du qui sait quoi. Dans cette description doivent apparaître les points faibles de l'organisation, les points à consolider (sauvegarde des savoir-faire), les points à améliorer (outil, pratique,...). Une bonne gestion des connaissances impliquent d’avoir une vue sur le patrimoine de connaissance et de savoir vers où l’entreprise veut évoluer (les connaissances à acquérir). Toute bonne gestion d’entreprise devrait donc prendre en compte la gestion des connaissances. Aujourd’hui, la gestion des compétences est souvent la seule activité à se soucier de cette question. Le travail de repérage des connaissances à gérer implique d’identifier à qui la partage des connaissances va être fait. En fonction du destinataire, le ou les moyens de transmettre la connaissance sont déterminés.
Extraire
Si un savoir-faire doit être formalisé, il est souvent nécessaire de "l'extraire". Les personnes ne sont pas toutes capables ou motivées pour formaliser leur savoir. L'extraction va être liée à la formalisation (modélisation, écriture,…) ; Elle est une tâche à part entière pour faire dire une connaissance souvent inconsciente. Elle demande des capacités de conduite d’entretiens, de formalisation, de conceptualisation et de questionnement. Cette dernière compétence, « poser les bonnes questions », permet de faciliter l’expression de la connaissance. Bien que les activités soient assurées quotidiennement, elles sont tellement intégrées dans le « subconscient », que les personnes oublient d’en parler. Ces connaissances « évidentes » sont souvent les plus difficiles à faire exprimer.
Formaliser
Partager et transmettre un savoir-faire se fait oralement de personne à personne ou passe par une formalisation sur un support (mur, papier, CDROM,…). On peut considérer l’expression orale comme une forme de formalisation par le langage, mais celle-ci est souvent parcellaire et volatile (les paroles s’envolent…) et avec l’inconvénient de ne pas toujours être bien communiquée et comprise. La formalisation de la connaissance peut aller du dessin jusqu'à la modélisation (MASK I, KOD...), en passant par l'écrit (l’homme préhistorique n’avait-il pas déjà le désir de mémoriser sa connaissance ?). Le savoir-faire s'écrit le plus souvent (le livre).
La modélisation structure la connaissance et donne une approche pour l’aborder (démarche systémique par exemple). La « gestion des connaissances » favorise cette formalisation. Le travail d'écriture est long et il faut s'assurer que le résultat soit transmissible à une autre personne, qu’elle soit déjà compétente sur le sujet ou non. La modélisation apporte une structure et un sens de lecture qui facilite cette tâche, « un dessin vaut mieux qu’un long discours ». Extraire et formaliser s’appelle « capitaliser les connaissances ».
Sauvegarder
Certaines entreprises ont simplement besoin de sauvegarder un savoir-faire (centrales nucléaires fermées, retour d’expériences...). La sauvegarde doit être réutilisable et compréhensible quelques années plus tard, parfois en l'absence du ou des spécialistes interviewés. La connaissance est alors être capitalisée (extraite, formalisée) et stockée pour être accessible.
Publier
Publier est très à la mode avec Internet. Beaucoup pensent que publier une connaissance suffit à la transmettre. C'est parfois vrai, mais souvent l’objectif est partiellement atteint. Un transfert de connaissance est valorisé si la connaissance est réutilisée. La connaissance doit être « reproductible », parfois dans un contexte différent (les outils, la matière…) et comprise et appropriée par le destinataire de la publication. Le problème est de savoir à qui on publie et donc comment. C’est un travail de communication, voir de pédagogie. Cependant, comme l’illustre le livre que nous utilisons abondement pour transmettre du savoir, la publication permet un partage de connaissance. Les nouveaux supports informatiques, CDROM, Internet, Intranet, Extranet, permettent de publier plus facilement (rapidité, qualité), avec une convivialité supplémentaire (liens hypertextes, multimédia). La modélisation des connaissances avec MASK, donne une structure à la connaissance qui permet de naviguer entre les concepts, d’indexer des documents, d’illustrer graphiquement des phénomènes ou des processus. La première utilisation de la capitalisation est le livre que nous appelons « le livre de connaissance » (LC).
Transférer
Par rapport à la publication qui ne se soucie pas du résultat (a priori), le transfert de connaissance implique une progression de la personne avec l’objectif qu’elle devienne au moins aussi compétente à terme. Des moyens sont mis en œuvre pour faire progresser et valider les compétences (formation, coaching, validation de compétence). La formation est la démarche la plus adaptée pour transmettre un savoir et valider la compétence.
Informatiser
L'informatique permet d'effectuer des tâches de plus en plus complexes et "intelligentes". L'intelligence artificielle (IA) offre des possibilités de reproduire plus ou moins bien le raisonnement humain et la mécanique offre de plus en plus de possibilités de reproduire des gestes. Le progrès technologique nous permet d’envisager de reproduire automatiquement une partie des connaissances humaines. Sans aller jusqu’à la robotisation, la modélisation des connaissances permet aussi de concevoir des applications informatiques "classiques" plus ergonomiques et qui effectuent des tâches cognitives répétitives (calcul, évaluations) pour aider l’humain dans ses tâches. Le projet Thot (Cofinoga 1996) était au carrefour des deux visions "Classique" et "IA" et reproduisait le raisonnement modélisé avec MASK (cf. Syade). Ce "système expert" offre en particulier la possibilité de modifier rapidement la logique de traitement de l'information. Cependant, l'informatique a un point faible : sa rigidité et sa lacune dans l'auto-évolution. Ainsi la connaissance dans le cerveau peut changer au gré des besoins ou des volontés, l’ordinateur ne peut le faire aussi facilement, et a du mal à suivre l'évolution… sans l’homme.
Les méthodologies de formalisation des connaissances (KOD, MASK...) permettent aussi de travailler les bases documentaires (gestion de documents, intrant) aussi bien pour les indexer et les rechercher (moteur de recherche), que pour structurer les contenus. Les organisations génèrent un volume important de documents (textes, tableaux, images, plans, etc.) et devant ce volume important de contenus, les utilisateurs perdent de plus en plus de temps à trouver le "bon" fichier.
Communiquer
Le partage des connaissances se fait souvent par des échanges d’individus à individus (réunion, présentation,…). L’objectif est aussi de favoriser ces échanges, soit sur la base de la modélisation qui peut servir de support de communication, soit sans. Dans ce dernier cas, l’échange ne se fait pas de manière exhaustive ce qui implique une connaissance commune entre les interlocuteurs pour qu’ils se comprennent. Ce sont les développements de communautés d’experts, de forum…
Faire évoluer
La connaissance n’est pas une chose figée, mais les formalisations oui. Il devient nécessaire de faire évoluer les formalisations avec la connaissance. Ce phénomène se fait dans les deux sens, de la connaissance à la formalisation, mais aussi de la formalisation à la connaissance dans le cas de la re-conceptualisation (cf. Figure 4 : Cycle du partage des connaissances). Il faut donc des ressources pour formaliser et transférer. L’idée est ensuite de manager et provoquer l’évolution du savoir pour suivre, voire devancer l’évolution et inciter à l’innovation et l’expérimentation. Le principe est de mettre en place une organisation pour suivre les performances. La description des connaissances donne la possibilité d’analyser finement les résultats par rapport aux pratiques suivies. Par exemple, dans le cadre d’une prise de décision, l’important est de savoir comment et pourquoi a été prise la décision, avec quelles informations et quelle connaissance au moment de la prise de décision. Le suivi amène à tester des pratiques en limitant le risque. L’organisation entre dans une dynamique de progrès et consacre « un peu » d’énergie à ses métiers. Elle apprend à évoluer et donc, par définition, devient plus intelligente (adaptation). C’est aussi un moyen d’être proactif, c’est à dire de devancer l’évolution de l’environnement et être prêt avant la concurrence.
Innover
L'innovation est indispensable ! Dans le chapitre précédent, nous avons vu l'innovation associée à l'évolution. Ici, il s'agit de se projeter dans l'avenir pour trouver de nouveaux marchés, réduire les coûts et se différencier de la concurrence. L'innovation a des implications sur l'organisation, elle devra s'adaptée, acquérir de nouvelles pratiques et donc de nouvelles connaissances. On le voit avec l'évolution de l'informatique, l'automobile ou dans la bataille des Fournisseurs d'Accès Internet. Derrière les nouveaux produits, toute une logistique doit suivre, centre d'appels, techniciens, commerciaux, communication... L'organisation créative est une organisation qui fabrique de la connaissance et fait évoluer ses acteurs vers la modernité.
L’innovation comme la conception est un processus difficilement maîtrisable, l’inspiration n’est pas toujours au rendez-vous. Comment favoriser la créativité ? Le club Gestion des Connaissances avec en particulier la commission Innovation donne une réponse à cette question.
La modélisation MASK est une démarche intéressante pour aider à créer cette nouvelle organisation. La connaissance a construire est double :
- La connaissance autour du produit ou service
- La connaissance nécessaire au fonctionnement des activités
MASK permet de modéliser ces deux formes de savoir. La modélisation du processus permet aux acteurs de l'organisation de visualiser et aborder tous les aspects de l'activité.
Améliorer
Les projets de capitalisation de connaissance ont montré les possibilités d'améliorer les savoir-faire des personnes. D'abord par la capitalisation elle-même : les personnes interviewées ont souvent l'impression de s'être enrichies. La formalisation des connaissances permet d'abord de visualiser sa connaissance, de la structurer, de prendre du recul, de se rappeler des expériences et les "pourquoi" de la connaissance actuelle. Ce phénomène est appelé l’effet miroir : voir ce que l'on sait. Une fois modélisée, la connaissance peut être facilement travaillée et optimisée soit par un autre service (un service de recherche par exemple) soit par l'échange avec d'autres personnes du même métier et/ou des managers. L'objectif est ensuite de faire progresser les personnes dans une logique d'amélioration permanente. Le coaching est une méthodologie très performante dans ce domaine. La mesure de performance et le travail sur les résultats peut, dans ce cas, s'appuyer sur la modélisation des connaissances pour identifier les points à améliorer.
Légiférer
Le cycle de formalisation-évolution des savoir-faire met les "experts" en première ligne. Ils sont le regard sur l'environnement et ils ont souvent des idées pour améliorer les pratiques. Ce cycle favorise la "remonter" des idées d'évolution. Cependant, le cycle d'évolution doit être maîtrisé, en particulier par des personnes qui vont avoir un regard avec plus de recul pour intégrer tous les facteurs d'évolution : la stratégie de l'entreprise, l'innovation, les projets en cours ou à venir, les concepts et les raisons de l'activité. Ainsi, une demande d'évolution qu'elle vienne du terrain ou d'un autre service (veille, organisation, méthode ou qualité) doit être réfléchie. La modélisation des connaissances aide à formaliser l'évolution et dans certaines activités peuvent permettre de simuler l'impact futur de l'évolution (cf. projet Thot à Cofinoga). Une fois réfléchie, l'évolution est formalisée et transférée (communication, formation, programmation) à l'ensemble des acteurs.
Manager
Les expériences dans des entreprises montrent la nécessité de manager le cycle de la gestion des connaissances. La pression de la productivité, de la concurrence, des résultats font passer les activités ne donnant pas un résultat (financier ou quantitatif) immédiat au second plan, voire dans l’oubli. Les progrès de la connaissance sont souvent difficiles à mesurer à priori et la rentabilité probable est difficile à démontrer. La Gestion des Connaissances a un rôle de communication et de management, d’abord pour expliquer les bienfaits du travail sur les savoir-faire, puis pour organiser et suivre le travail. Manager ne veut pas dire de forcer les activités à gérer leur connaissance, mais les aider et leur faciliter le travail.
Utiliser
Tous ces efforts ne sont utiles que si la connaissance est utilisée et qu’elle permet de faire progresser les performances individuelles. Cette utilisation passe par une phase d’appropriation. Selon les métiers, la connaissance demande à être « vécue » pour être comprise et assimilée. Par exemple, la reproduction d’un geste, l’utilisation d’un sens, ou la reproduction d’une démarche.
L'appropriation d'une nouvelle connaissance
Transférer un savoir-faire n’implique pas (malheureusement) de transformer une personne en expert en quelques heures ou jours de formation. La compétence de la personne et sa motivation sont des composantes de l’appropriation. Cette phase d’appropriation sera donc plus ou moins longue selon la complexité de la connaissance et les compétences et la motivation de la personne. Le travail de management voire de coaching est déterminant pour aider à faire évoluer la personne. L’utilisation est appréciée à travers les résultats de l’activité. Ces résultats peuvent être rapprochés de la formalisation des connaissances pour tenter d’évaluer où l’activité peut être améliorée. Cette démarche est l’initiation d’un cycle de progression basée sur la formalisation et le travail des connaissances.
Concevoir la stratégie
Le cycle de la gestion des connaissances doit être mis en œuvre au service d'une stratégie d'entreprise. La stratégie projette l'entreprise dans un terme plus ou moins long, avec des enjeux, des objectifs à atteindre. Dans les moyens qu'elle devra se donner pour mettre en œuvre sa politique, la connaissance est une des ressources incontournables. Jusqu'à présent, les stratèges ne pensent pas toujours à la connaissance. Il pense au management des hommes et à la conduite du changement pour palier aux réticences naturelles du changement. Depuis peu, certains hauts managers réalisent qu'il faut prendre en compte l'humain et sa connaissance. Beaucoup comptent sur l'adaptation naturelle des hommes et des femmes pour évoluer. La gestion des Connaissances propose des méthodes (Cf. MASK II) pour voir plus clair sur le patrimoine des connaissances et invite à une réflexion sur les moyens de le faire évoluer aussi vite que le demande l'environnement et la stratégie d'entreprise. Coordonnée avec une bonne gestion des "ressources humaines" et une vision claire des compétences, cette gestion stratégique du savoir permet d'optimiser "l'adaptabilité" et la souplesse de l'entreprise.
On retrouve l'exigence de la gestion des connaissances dans les démarches de management par la qualité tel que l'EFQM et ISO 9001. Dans le chapitre 6.2.2 Compétence, formation et sensibilisation de la norme ISO 9001-2008, on trouve :
"L'organisme doit
a) déterminer les compétences nécessaires pour le personnel effectuant un travail ayant une incidence sur la conformité aux exigences relatives au produit;
b) de façon adaptée, pourvoir à la formation ou entreprendre d'autres actions pour acquérir les compétences nécessaires;
c) évaluer l'efficacité des actions entreprises;
d) assurer que les membres de son personnel ont conscience de la pertinence et de l'importance de leurs activités et de la manière dont ils contribuent à la réalisation des objectifs qualité;
e) les enregistrements appropriés concernant la formation initiale et professionnelle, le savoir-faire et l'expérience (voir 4.2.4 Maîtrise des enregistrements)."
De la capitalisation au savoir
Le schéma précédent (Figure 5 : Cycle de la gestion des connaissances) est basé sur la formalisation du savoir-faire des acteurs de l’organisation, il peut être généralisé à toute forme de savoir ou à l’information. On peut résumer la démarche de Gestion des Connaissances aux questions suivantes :
- Quels savoir ou informations communiquer ?
- A qui les communiquer ?
- Pour quoi ? (objectif : pour information, pour appropriation)
- Comment ? (formalisme, méthode)
Valoriser les connaissances
Certains écrits parlent de valorisation des connaissances, terme au sens vendeur, et qui sous-entend « bénéfices ». En fait, la connaissance est valorisée quand elle est utilisée et efficace (performances qualitatives et quantitatives). Il ne suffit donc pas de formaliser, partager, former. La connaissance a la valeur de son utilisation et de sa performance. Cette valorisation peut être mesurée en étudiant la « criticité » de la connaissance, c'est-à-dire son utilité, sa complexité, la difficulté à l’acquérir, le nombre de détenteurs et le risque de perte. Cette évaluation peut être projetée dans l’avenir à court et moyen terme pour évaluer les évolutions stratégiques à faire par l’organisation (acquisition de nouvelles connaissances et/ou de nouvelles compétences). Elle est ensuite évaluée par les démarche de VA, non VA, soit Valeur Ajoutée qui tente d’évaluer ce que coûte et rapporte une activité. Elle aussi est évaluée par les performances individuelles et collectives de l’activité et de ses acteurs. La qualité de la connaissance est en corrélation avec les performances. Une entreprise qui conçoit et réalise un produit, que ce soit un service ou un produit manufacturé, conçoit la connaissance qui va avec, celle issue de la conception, celle pour la mise en œuvre, la fabrication, la mise en vente, ainsi que la capacité de mise en œuvre etc.. L'entreprise conçoit, fabrique et vend un produit et elle fabrique aussi une connaissance "induite". Cette capacité de l'entreprise à évoluer, s'adapter, innover, mettre en œuvre de nouveaux processus donnent à l'entreprise une valeur qui dépasse souvent sa propre valeur mobilière.
Le système de connaissance
Gérer les connaissances contribuent à optimiser le processus, à le rendre plus performant et fiable en jouant sur la connaissance. En explicitant les connaissances et en créant des « systèmes à bases de connaissance », on éclate le « système de connaissance » avant uniquement humain, en un système humain et « support » (documents, sites web… informatique). Le pilotage du métier change :
"Piloter" la connaissance
D’une culture de résultat, la gestion des connaissances amène une culture du progrès. Cette approche se centre sur le métier pour le faire progresser. « Les cordonniers sont les plus mal chaussés » et les métiers font souvent passer leur technique en second rang après le travail à faire. La gestion des connaissances, du moins cette phase de travail de la connaissance, invite à prendre du recul. La connaissance est indissociable de l’individu, même si l’informatique et la robotisation progressent et prennent une part de plus en plus importante dans les tâches répétitives. N’oublions pas, derrière les ordinateurs, il y a des hommes et des femmes qui transfèrent la connaissance humaine et utilisent leur connaissance pour faire travailler ces machines. L’ordinateur ne fait pas tout et montre ses limites face à la performance du cerveau ; le travail de la connaissance est donc un travail sur les individus. Ce sont leurs performances que l’on essaye d’améliorer et les méthodes, en particulier le coaching, utilisent de plus en plus des principes psychologiques et pédagogiques du « travail sur soi ».
La gestion des connaissances dans les activités
Depuis longtemps je milite pour que la formalisation d'informations, même si elle n'est pas parfaite, soit réalisée au quotidien par les différents acteurs. En particulier pour deux activités.
Les activités projet
Un projet a un début, une vie et une fin. Une fois que le projet est terminé, la tendance est de ranger tous les documents dans un coin d’un ordinateur.
Certains projets durent plusieurs années, et parfois, le turn-over fait qu’une personne doit reprendre le projet en cours de route. L’appropriation sur le projet, où il en est, avec qui travailler, toutes ces informations ne sont pas toujours accessibles facilement.
Et ce turn-over peut malheureusement arriver avec les « accidents de la vie » (maladie, accident…). Il faut donc penser à formaliser au fur et à mesure du projet.
Le projet a une vie, des problèmes sont identifiés, des choix sont faits et des décisions prises. Si le projet se termine, deux cas peuvent arriver :
- Quelques années plus tard, la mise en œuvre du projet est à faire évoluer, il faut donc reprendre les informations du projet.
- Un nouveau projet est à faire et il peut s’inspirer, dans la démarche par exemple, d’un projet précédent.
Les développements informatiques
Documenter le code ! Il faut, mais ce n’est pas parce qu’on documente son code qu’il sera pour autant facile à reprendre et faire évoluer (je suis bien placé pour en parler, je développe, et il m’arrive parfois de me demander pourquoi j’ai écrit le code comme ça… les commentaires écrits sur le moment paraissaient compréhensibles, évidents même, mais après plusieurs mois…). Il faut donc penser qu’un développeur aura peut-être à reprendre le code pour le faire évoluer.
C’est très opportun lorsqu’on développe des « POC » (Proof Of Concept) ou des prototypes qui seront ensuite développés en une application finale. L’activité « recherche et développement » est très en cours en IA (Intelligence Artificielle) avec des tests et essais de réseaux de neurones ou des algorithmes complexes.
Définitions
Après avoir vu les principes de la Gestion des Connaissances, nous pouvons en donner une définition. Il existe beaucoup de définitions dans les livres et les sites internet. En voici deux qui semblent être le plus proche des principes, et une troisième de ma création.
Ingénierie des connaissances : « L'ingénierie des connaissances propose des concepts, méthodes et techniques permettant de modéliser et d'acquérir les connaissances dans des domaines se formalisant peu ou pas » (définition du Gracq ou du livre Ingénierie des Connaissance de Charlet, Zacklad, Kassel, Bourigault)
KM = Gestion des Connaissances (en français) : « Toutes les actions managériales visant à répondre à la problématique de capitalisation des connaissances dans son ensemble » (Grundstein et Zacklad)
La Gestion des Connaissances (Plénitudes) Toutes les actions visant à répondre à la problématique de la sauvegarde, du partage et de l’évolution des savoir-faire et des connaissances dans le but d’optimiser les activités de l’organisation (Serge Aries)
La gestion des connaissances dans l’entreprise
Ce chapitre présente la gestion des connaissances articulée autour de la formalisation des connaissances. Dans la pratique, le besoin est plus vaste et le management des connaissances est sollicité pour des projets de formalisation et publication d’information avec en particulier la création d’intranet.
La gestion des connaissances devient souvent un facilitateur de la circulation de l’information au sens large. Par exemple, il n’est pas rare de voir la veille stratégique (ou veille économique) être associée à la gestion des connaissances.
Notre société est de plus en plus basée sur l’information. Le volume augmente et les managers veulent « tout savoir » avant de prendre une décision. Au fur et à mesure de l’accroissement d’informations, l’entreprise se retrouve submergée, et même noyée. Certains managers reçoivent tellement de mails qui ne les lisent plus. Trop d’informations tue l’information. Elle prend alors des dispositions pour traiter l’information (trier, dispatcher…).
Les projets de gestion documentaire sont un exemple qui illustre bien ce fait. D’abord l’entreprise se retrouve avec une somme de documents bureautiques (Textes, tableaux, présentations…) sur des PC. D’une culture machine à écrire, l’entreprise continue avec une culture documentaire informatisée. La première évolution est le serveur de fichier qui permet de partager les fichiers entre différente personnes. Avec un démarrage souvent sauvage, le besoin d’organiser un minimum les répertoires, ou dossiers dans les nouvelles versions de Windows, se fait vite pressant. Devant le nombre de documents et la gestion de la confidentialité parfois complexe, l’entreprise se dote d’un logiciel de gestion documentaire qui permet d’enregistrer le document avec des attributs qui permettront de le retrouver plus facilement. Des processus de Workflow tentent de faciliter le cycle de validation des documents ou la composition d’un document par plusieurs auteurs. Le nombre de document augmentent toujours, les attributs ne sont pas toujours bien renseignés et pour faciliter la recherche, l’entreprise se dote d’un moteur de recherche. Le problème de l’indexation des documents est un des problèmes actuels. Avec Internet, les prestataires de moteurs de recherche se livrent une bataille commerciale (Google, Yahoo…). La démarche du moteur de recherche dans l’entreprise suit la même logique que celle d’internet : pouvoir retrouver n’importe quel document à partir de mots clef. Cette solution a ses limites : pour retrouver un document il faut parfois consulter plusieurs documents avant de trouver le bon. La démarche suivante est de prendre le problème dans l’autre sens, réfléchir aux documents utiles au poste de travail et de les présenter souvent via un intranet, le plus rapidement possible. Cette solution est complémentaire du moteur de recherche. Elle permet à une personne à son poste de trouver en moins de trois clics le document utile à son activité. L’évolution suivante est généralement de passer d’une culture documentaire à une solution base de données avec une restructuration complète de l’information.
L’entreprise génère et consomme de l’information mais elle ne se donne pas toujours les moyens de traiter l’information. Combien d’entreprise se lance dans un projet d’intranet pour s’apercevoir qu’il faut des ressources à plein temps pour faire vivre l’information ?
Les directions des systèmes d’information sont encore centrées sur l’informatique. Le problème de l’information dans l’entreprise n’est pas qu’un problème informatique, il est surtout un problème métier : quelles informations me sont nécessaires pour mon travail. Et dans l’information, nous retrouvons nos trois types : l’information qui impacte le savoir, les informations de l’activité (en entrée, en sortie ou en ressources de l’activité) et l’information sur l’environnement interne et externe au service.
C’est donc souvent la mission de la Gestion des Connaissances de gérer ces flux. Avec la connaissance de la connaissance et de l’information, les « knowledge managers » mettent leur savoir au service du traitement de l’information. Que l’on appelle ces projets du management des connaissances ou de l’information, peu importe, l’objectif est de combler un vide fonctionnel.
Il existe encore peu de service de management ou gestion des connaissances dans les entreprises. Est-ce parce qu’il est difficile d’ajouter un service au milieu des autres (problème de pouvoir ?) ? Ou est-ce une question de maturité ? Mais les entreprises font souvent de la gestion des connaissances soit sans le nommer, soit par le biais d’autres démarches comme la gestion des compétences, le management par la qualité, l’informatique et les intranets et la gestion documentaire… La gestion des connaissances se situerait à la frontière de plusieurs activités :
- La gestion stratégique de l’entreprise : les managers se projettent dans l’avenir et pour atteindre leurs objectifs, ils doivent envisager les connaissances qu’ils devront acquérir par la recherche ou l’acquisition.
- La gestion des compétences : la compétence et la connaissance sont liées. Pour être compétent, il faut avoir de la connaissance et savoir la mettre en œuvre. La compétence est en quelque sorte la partie reconnue et visible de la connaissance. Gérer les compétences implique de gérer les savoir.
- La formation : le recrutement implique de former les arrivants aux métiers de l’entreprise. Dans certaines entreprises, le savoir est spécifique et la formation est construite à partir des connaissances de ses experts.
- L’informatique : la gestion documentaire et les intranets font de plus en plus appels à des techniques de sciences cognitives, indexation automatique, taxinomie, arborescence… Dans l’autre sens, la diffusion de l’information fait appel à l’informatique, au réseau, aux technologies modernes (développement en java, PHP, liens hypertextes …)
- Management par la qualité : l’EFQM a un chapitre sur le patrimoine intellectuel. Les entreprises industrielles gèrent leurs brevets mais pas toujours leurs savoir-faire. La connaissance est reconnue comme un patrimoine qui doit être géré.
- Les métiers : Ils sont de plus en plus demandeur d’informations et de capitalisation des connaissances. Ils ont besoin de personnes qui comprennent leur métier pour des solutions adaptées à leur travail.
- L’organisation : pour des activités où le changement est fréquent comme les activités à forte concurrence (Fournisseurs d’Accès Internet, Téléphone Mobile…), les nouvelles offres commerciales sont aussi l’évolution de l’organisation. Publicité, communication, hotline, facturation, installation d’infrastructure… La connaissance est en mouvement permanent. Plus que de l’adaptation, la connaissance est modifiée avant la mise en œuvre de la nouvelle offre soit par de l’information, de la formation ou di coaching.
- Le management et le coaching d’équipe : Certaines entreprises, en particulier dans les centres d’appels, s’organisent sur le modèle de l’équipe avec un coach. Le rôle du coach est plus qu’un management de personnes. Il fait preuve de psychologie pour gérer la performance individuelle. Le coach est un accompagnateur de son équipe. En particulier, il cherche à faire progresser son équipe. La performance individuelle passe en grande partie par la connaissance (savoir, savoir-faire et savoir-être).
Il suffit de regarder sur internet les pages sur la gestion des connaissances ou « KM » (Knowledge Management) pour voir certains métiers comme la gestion des ressources humaines, la veille stratégique et bien d’autres, tirer le knowledge management à eux. Cette tentative de prise du pouvoir est sûrement influencée par l’effet de mode du KM.
Que conseiller aux dirigeants d’entreprise ? Un nouveau service Gestion des Connaissances ? L’intégration de la gestion des connaissances à un service existant ? Faut-il vraiment une gestion des connaissances dans l’entreprise ou est-ce un besoin ponctuel auquel un prestataire de services externe peut répondre ? L’observation montre qu’il y a un besoin et d’un point de vue un peu fataliste nous pourrions dire, peu importe où, pourvu qu’il y ait la fonction et la mission.
Notre monde, et donc celui des entreprises est en pleine évolution : mondialisation, complexité croissante du savoir, durée de vie d’un produit plus courte, innovation permanente, effet chaotique de la mondialisation (un évènement dans un autre pays, une guerre, un cataclysme, une décision politique, peut avoir un impact sur l’économie local). L’entreprise doit avoir des spécialistes de plus en plus « pointues » et développer une souplesse pour réagir et s’adapter le plus rapidement possible, voire, dans l’idéal, agir avant le changement extérieur.
Ce contexte implique un développement de la connaissance et de l’intelligence. L’intelligence est ici comprise dans le sens de l’adaptation. La gestion des connaissances n’est plus simplement une gestion des savoirs présents, il est un cycle permanent de création de connaissance.
Cette mouvance du monde, ce floue sur l’avenir ne facilite pas le travail des dirigeants. Cela explique en partie leur besoin sans cesse croissant d’informations pertinentes. Ils multiplient les démarches de modernisation, de changements, et il n’est pas rare de voir les opérationnels crouler sous le nombre de « projets de changements » qu’ils repoussent le plus possible en justifiant leur objectif de performance.
L’entreprise de demain devrait donc se doter d’une fonction support pour gérer l’évolution dans laquelle la gestion des connaissances serait un acteur central. Cette fonction centraliserait les besoins d’évolutions et organiserait avec le recul nécessaire et sage, les différents projets de changement. Une de ces fonctions serait aussi d’être le point central de la « vision extérieure ». En s’inspirant des êtres vivant, le cerveau centralise les perceptions et décident plus ou moins consciemment et plus ou moins contraint, de l’adaptation. En définitive, le schéma serait peut-être de s’inspirer du monde naturel en développant la capacité d’adaptation (perception, analyse, adaptation), en utilisant l’intelligence créatrice (innovation, développement de nouveaux comportements), et une croissance organisée et équilibrée (comme un arbre qui cherche la lumière mais qui ne se déséquilibre pas). L’avantage de l’homme sur la nature est sa capacité d’inventer et bâtir ce qui nous a amené à notre monde technologique d’aujourd’hui. Sans aller jusqu’à ces considérations de systèmes intelligents, ce chapitre tente de montrer l’importance de la connaissance. Elle est au centre de toute activité. L’objectif est de passer d’une organisation qui ne fait que réagir aux évènements, à une organisation qui développe et gère l’information et sa connaissance de manière… professionnelle.
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Mise à jour : 22/12/2022
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